L’inclusion numérique et le marché du travail
Le défi de l’accès universel aux nouvelles technologies
Leila Marco
10/02/2016 à 13:25, Mercredi | Mis à jour le 22/09 à 16:07
Profiter au maximum de ce que peuvent offrir les nouvelles technologies, tout en se conciliant avec l’augmentation exponentielle de l’information, devient de plus en plus nécessaire. Jusqu’au début des années 1990, les connaissances et l’utilisation des réseaux informatiques dans le monde se sont limitées à la communauté scientifique et universitaire. L’internet tel que nous le connaissons aujourd’hui a surgi avec la création du World Wide Web (www), en 1990, par l’informaticien Timothy John Berners-Lee du Conseil Européen pour la Recherche Nucléaire (CERN).
Bien que ce soit un grand facilitateur de tâches et une ressource importante pour le processus éducatif, l’Internet et ses outils ne sont pas encore disponibles pour tous et cela influe sur le processus d’inclusion sociale et l’accès des personnes à de meilleures opportunités sur le marché du travail. Le professeur Nelson de Luca Pretto, auteur du livre Uma escola sem/com futuro: Educação e multimídia [Une école avec ou sans avenir: Éducation et multimédia] (1996) affirme que « l’analphabète de demain sera la personne qui ne sait pas déchiffrer le nouveau langage engendré par les moyens de communication ».
Pour massifier l’utilisation des technologies de l’information et de la communication (TIC) comme une façon de contribuer à l’amélioration des conditions de vie de la population, les pays confrontent généralement à de sérieux obstacles, y compris les pays émergents comme le Brésil.
En mai 2012, la Fundação Getulio Vargas (FGV) a rapporté dans son étude de la nouvelle Carte de l’Inclusion Numérique, développée en partenariat avec la Fundação Telefônica/Vivo, que l’économie brésilienne, vivait encore une « apartheid numérique ».
Selon la recherche, coordonnée par l’économiste Marcelo Neri, alors directeur du Centre pour les politiques sociales de la FGV et aujourd’hui ministre en chef intérimaire du Secrétariat aux affaires stratégiques (SAE), un tiers de la population a accès à Internet à la maison, et sur 100 Brésiliens de plus de 10 ans, 65 disent ne pas connaître le Web. Une autre donnée attire l’attention : la concentration des produits numériques dans la classe sociale A (aux revenus les plus élevés) ; sur 10 foyers disposant d’un ordinateur et d’accès à Internet, 7 font partie des plus riches. Cela montre qu’il reste beaucoup à faire pour corriger les inégalités dans l’accès aux TIC.
La Légion de la Bonne Volonté aide à réduire ces inégalités en travaillant pour l’inclusion numérique et l’amélioration des conditions de vie des familles à bas revenus. Pour cela, elle possède depuis plus d’une décennie des laboratoires d’informatique dans une bonne partie de ses écoles et de ses Centres Communautaires d’Assistance Sociale. Pour la seule année 2012, elle a réalisé dans ce domaine plus de 93 000 accueils, au profit des enfants, des jeunes (à la recherche d’un premier emploi), des adultes (en reclassement professionnel) et des personnes âgées.
Une action concentrée sur le Nord et le Nord-est brésilien
La Carte de l’Inclusion Numérique a aussi montré une situation d’inégalité entre les cinq régions brésiliennes. Le classement d’accès à l’Internet a indiqué une division de deux groupes distincts. Les dix premières places réunissent les États du Sud, du Sud-Est et du Centre-Ouest, tandis que les États du Nord et Nord-Est présentent position inférieure.
Dans ces deux dernières régions, la LBV travaille intensément pour réduire la différence d’opportunités numériques, en particulier on souligne l’action menée aux villes d’Aracaju (Sergipe), Belém (Pará), Fortaleza (Ceará), Itabuna (Bahia), Recife (Pernambuco), Salvador (Bahia), São Luís (Maranhão) et Teresina (Piauí). Les activités du laboratoire d’informatique de l’Institution font partie du programme Formation et inclusion productive, qui offre des cours gratuits afin de développer des compétences pour une meilleure insertion professionnelle ou pour aider les participants à devenir un entrepreneur. Cette initiative stimule également la vie en communauté et les valeurs de la citoyenneté.
Dans les cours d’informatique, les participants apprennent à utiliser les logiciels (éditeur de texte et tableur), les programmes de navigation sur Internet et le système d’exploitation de l’ordinateur. L’objectif principal est de fournir une formation numérique pour les jeunes et ceux qui sont en dehors du marché du travail, qui exige de plus en plus ce type de connaissances de la part des travailleurs. Les élèves reçoivent également des conseils pour monter et mettre en forme leur curriculum vitae.
Une place sur le marché du travail
À Recife, Victorio Drumond de Farias, 20 ans, est l’un des nombreux jeunes qui recherchent un soutien auprès de la Légion de la Bonne Volonté. Issu d’une famille pauvre de Recife, il ne pouvait pas se permettre de payer un cours et il a trouvé à la LBV une voie pour se développer. En plus d’apprendre comment utiliser les outils numériques les plus demandés actuellement, Victorio a relevé d’autres avantages du cours : «On nous a donné de nombreux textes à lire et à taper, ce qui a enrichi notre connaissance de la langue portugaise. On priait tous les jours, c’était bon pour moi et je pense que pour les autres aussi, le groupe était très uni à cause de cela ».
Pour ce garçon, le plus grand volume de lecture et la qualité des textes ont été cruciaux pour apprendre à mieux s’exprimer dans les entretiens d’embauche. Dans un récent processus de sélection auquel il a participé, avec environ 100 personnes, il a été choisi parmi les 25 candidats les mieux préparés. Ce bon résultat lui a garanti une bonne insertion profissionnelle, et une incitation à poursuivre de nouveaux rêves.
Jeune revient à la LBV pour rétribuer ce qu’il y a appris
Le Centre Communautaire d’Assistance Sociale de la Légion de la Bonne Volonté à Itabuna, Bahia, est un exemple de l’excellence dans la formation numérique. En plus de ce service, il y a un souci d’inclure des informations et des contenus supplémentaires, ce qui a conduit la LBV à établir des partenariats importants, dont l’un avec AdmTecno Júnior Consultoria e Projetos, formé et géré par des étudiants en gestion, en sciences informatiques et en psychologie de la Faculté de Sciences et Technologies (FTC) d’Itabuna.
Grâce à ce soutien, un cycle de conférences est mené depuis la seconde moitié de 2012 et rassemble des invités bénévoles de cet établissement d’enseignement. En novembre, sous la direction du professeur Eliane Marinho, l’étudiant en gestion Hayan Carlson a donné une conférence sur « développement professionnel ». Il a d’abord présenté aux personnes accueillies à la LBV un aperçu du marché du travail, en mettant l’accent sur la qualification professionnelle. Ensuite, l’intervenant a expliqué le fonctionnement des entreprises. La rencontre a suscité un grand intérêt des participants. Pour le jeune universitaire, cette initiative de l’Institution ouvre les portes de la connaissance à de nombreux jeunes. Il cite son propre exemple : « Il y a 12 ans le cours d’informatique de la LBV m’a beaucoup aidé dans ma carrière professionnelle, et [l’Institution] continue à faire ce travail mer veilleux avec d’autres personnes. L’expérience d’aujourd’hui a été gratifiante, beaucoup de gens sont sortis d’ici en se rendant compte qu’ils sont capables de réaliser leurs rêves. Je remercie la LBV de l’occasion de partager un peu de mes connaissances... j’en suis très heureux ».
Sans limite d’âge
Afin de profiter des avantages apportés par l’utilisation des nouvelles technologies, de nombreuses personnes âgées cherchent à entrer dans le monde numérique. Elles veulent se sentir actives et à la page, en phase avec le mode de vie de leur famille et de la société. Elles doivent pour cela surmonter des difficultés éventuelles de mémorisation et de manipulation de l’ordinateur, par exemple, au-delà de l’accès restrictif au monde de l’informatique.
Francisca Gregório, de 67 ans, habitante de Fortaleza, avait des difficultés à utiliser même les guichets automatiques de banque, et souffrait également d’un cadre psychosocial inquiétant, incluant une faible estime de soi et un manque de motivation. Au Centre Communautaire d’Assistance Sociale de la Légion de la Bonne Volonté à Fortaleza, elle a trouvé le soutien nécessaire dans le programme Espace d’échange d’expériences.
Grâce à cette action solidaire, elle a pu surmonter des obstacles. « J’avais honte, à mon âge, d’entrer dans le cours d’informatique. Alors, un professeur d’ici m’a dit que ça ne posait pas de problème. » Même avec le cours encore en progression, Francisca se réjouit : « C’est une victoire, je peux déjà faire beaucoup de choses... ouvrir un bloc-notes, aller sur Facebook et faire des recherches sur Internet, et je ne savais même pas allumer un ordinateur ».
Ce projet de l’Institution qui familiarise les personnes âgées avec l’environnement numérique est une façon de contribuer à ce que les personnes du troisième âge aient aux côtés des jeunes des chances égales d’évoluer. Cela signifie, selon les mots du président de la LBV, Paiva Netto : « combiner au patrimoine de l’expérience des personnes plus âgées l’énergie abondante des plus jeunes ».
Collaborez pour étendre ce travail. Faites votre don en ligne, par le site www.legionofgoodwill.org. Pour d’autres informations écrivez à : francais@boavontade.com.